Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

En mon fort intérieur

22 juin 2010

Parmi les roseaux

    J'ai fait un mauvais rêve.

    Il était question que mon petit ami me trompe. C'était l'idée générale, je restais à la maison - dans un petit pavillon sombre à la campagne, que d'ailleurs je ne reconnais pas - et lui sortait, pour la nuit ou le week-end, suivant comment les choses se passeraient. Il me l'avait sans doute expliqué parce que je me trouvais, au début du rêve, à savoir ce qui était prévu sans qu'on ait besoin de me le dire. Il était question, aussi, qu'il lui offre un cadeau avec une bague dedans. Il était visiblement très à l'aise tandis que j'étais en proie à une horreur grandissante. Je voulais hurler contre le principe même de l'adultère mais cela semblait déjà trop tard puisque tout était prévu : on n'en arrive pas là en un jour et il aurait fallu que je m'y prenne plus tôt pour protester - il aurait fallu que je me réveille avant. De plus j'avais un reste de répugnance à jouer le rôle de la furie hystérique qui donne ainsi raison à celui qui la trompe avec une femme plus raisonnable.

    Je me souviens avoir voulu me noyer dans l'étang aux roseaux derrière la petite maison où nous étions. L'eau était fraîche et je n'aimais pas ça, mais je voulais m'enfouir la tête sous l'eau, pour ne pas crier, pour ne pas pleurer.

    Il est venu me rejoindre dans l'eau, je n'ai pas vraiment compris pourquoi vu qu'il n'avait apparemment aucune intention de me rassurer. Pas me rejoindre en fait, puisqu'il restait à cinquante centimètres de moi sans me toucher. Il avait les yeux dans le vague, comme s'il se réjouissait à l'avance de sa soirée. Il était dans une bulle légèrement fébrile qui m'excluait.
Je posai une question timide. "Si tu m'avais fait une fellation lundi, je n'aurais pas eu besoin de faire ça."
Je ne sais pas pourquoi lundi, ça faisait sens dans mon rêve. Il me dit qu'ils iraient peut-être à l'opéra en fin de soirée. C'est ce qui m'horrifia le plus.

    "Tu ne veux jamais aller à l'opéra avec moi". Il répondit quelque chose de très méprisant et culpabilisant, comme "Ne fais pas l'enfant." Puis il se demanda quel opéra ce serait, il ne savait pas. L'autre femme lui téléphona juste à ce moment-là. Il eut un sourire puis se retourna vers moi avec un petit air complice pour me dire que ce serait peut-être Carmina Burana.

    Son regard se perdit à nouveau. Je vis la silhouette d'une voiture se garer devant la maison. Elle était venue le chercher. Je crois qu'il lui proposa d'entrer quelques minutes, le temps qu'il se prépare, mais elle a refusé et j'ai pensé qu'elle avait plus de décence que lui.

    Je me suis réveillée alors et j'ai pleuré en constatant que mon petit ami avait déjà quitté la maison pour aller travailler.

Publicité
21 avril 2008

Les amitiés adolescentes

    Tout le monde a eu des amis de lycée, ceux qui sont les meilleurs du monde et qu'on gardera toujours, etc. Je ne fais pas exception à la règle. Après avoir vécu une relation fusionnelle (à la limite de l'homosexualité platonique, peut-être) avec ma voisine de chambre en internat, j'ai eu un groupe d'amis après la grande trahison (elle est partie un an à l'étranger et nous avions tellement changé, chacune de notre côté, que nous nous sommes détestées à son retour). Deux garçons, deux filles (en plus de moi). Je suis sortie avec l'un d'entre eux, j'ai aussi été amoureuse de l'autre un moment, il a fini par se fiancer à une de mes amies.

    Après notre bac, nous sommes tous allés dans des directions différentes, régions différentes, pour faire des études différentes.  Nous avons continué à nous voir quand même. J'ai trouvé un petit ami (dont je vous ai parlé dans les premiers articles de ce blog), je leur ai présenté, ils l'ont adoré. Je l'ai plaqué, ils ne s'en sont pas formalisés. Ma foi, tant mieux pour eux tous.

    L'été dernier, alors que j'étais seule à me morfondre dans la maison de mon chéri, le nouveau, qui bossait pendant la journée, je passais les jours à jouer à Guild Wars (un jeu de rôles en ligne), ou à surfer sur Parano (un site communautaire belge, je vous en reparlerai peut-être à l'occasion).
    J'ai revu l'une d'elles, nous sommes allées à Europa Park avec des amis de son école, elle m'avait demandé de venir parce qu'elle se sentirait peut-être seule au milieu de la bande. En fin de compte, les gens en question se sont révélé être un tas de pimbêches avec leurs petits amis respectifs. On m'a forcé la main pour dormir à l'hôtel au lieu du camping, c'était plus cher et on avait le matos. Et ensuite elles m'ont snobé tout le week-end. On ne répondait pas à mes questions, on faisait semblant de ne pas entendre mes propositions.
    Une autre fois, cette fille est venu passer quelques heures près de chez moi, nous sommes allées manger ensemble. Je lui ai expliqué pourquoi je n'avais pas apprécié qu'elle m'attaque sur ma geekitude. Oui, je passe du temps sur Internet. Oui, j'en parle beaucoup. Mais j'essayais aussi d'être présente quand on se retrouvait tous, et si je ne donnais pas beaucoup de nouvelles, je n'en recevais pas non plus.

    Pour son anniversaire, elle voulut nous inviter tous dans son nouvel appartement en Alsace, y compris mon ex. J'ai dit que je ne viendrais pas. Qu'ils le voient en mon absence s'ils le voulaient, je n'avais pas envie de passer un week-end avec lui. Déjà quand nous étions encore ensemble, il gâchait nos moments de retrouvailles.
    Finalement, il n'a pas pu venir, ayant des soucis avec sa petite amie (une sombre jubilation m'avait envahie à cette nouvelle). J'ai pris un billet de train pour l'Alsace, malgré mon état (je couvais une sale grippe).

    Ce fut la grande déception. Celle qui nous recevait ne cessa de m'asticoter, en me parlant de la fin du dernier Harry Potter, en nous montrant ouvertement qu'elle était fière de travailler (avec du mépris dans la voix pour nous qui étudiions encore). L'autre fille ne parla de tout le week-end que de sa famille, de son BTS et de son mariage avec son fiancé, encore et encore. Le fiancé en question, lui, me déçut en déclarant que les jeux que j'avais apportés pour l'occasion étaient ennuyeux et qu'il ne voyait pas l'intérêt. La première renchérit. On n'est pas obligé d'aimer les jeux que j'aime, mais qu'on n'essaie pas plus de cinq minutes m'agace. Surtout que mes jeux demandaient de se creuser un peu la cervelle. Sa réponse était typiquement copiée sur celles de mon ex. Se prendre la tête, c'est nul. Dire n'importe quoi et surtout ne pas essayer de réfléchir, ça c'est le fun.
    Seul mon ex ne m'avait pas déçue. Il était toujours là, drôle, cynique, et doux au fond de tout ça.

    Je ne les ai pas revus depuis. Par contre, je les vois toujours connectés de temps à autre sur MSN, et je vais visiter leurs blogs pour prendre des nouvelles quelquefois. Et cette semaine, j'ai vu qu'il (le fiancé) avait posté deux vidéos sur Youtube. Je suis allée les voir : ce sont deux montages avec des photos des bons moments qu'ils ont passés ensemble récemment. Ensemble, c'est-à-dire sans moi... et avec mon ex.

    Donc, au menu ce soir : déprime (l'amitié est une illusion), jalousie (que je ne sois pas assez bien pour eux passe encore, mais qu'ils choisissent mon ex qui est plus bête que ses pieds...) et prise de conscience (j'ai pas d'amis... si mon copain me quitte je n'ai plus qu'à prendre un chat et me mettre des bigoudis).
    Et c'est vrai que c'est une angoisse qui m'étreint régulièrement. Je me suis fait une amie en prépa, nous sommes allées en fac ensemble, et nous sommes toujours ensemble en cours. De ce fait je ne m'ouvre que peu aux autres et je ne fréquente pas les gens de la fac. Je fais partie d'une association, donc je vois des gens, mais ce sont plus des connaissances que des amis. Et cette amie de prépa me déçoit un peu aussi en ce moment. J'ai peur que mon copain me quitte, j'ai peur de perdre ma dernière amie, j'ai peur qu'on ne m'invite à des soirées que parce que je suis "la copine de" et pas pour moi. J'ai peur que les gens de l'association ne me supportent que parce que j'ai payé l'adhésion.

10 mars 2008

Les séquelles enfouies

    Mon amoureux a dix ans de plus que moi. Je m'en suis beaucoup inquiétée au début, en me demandant si ce serait un obstacle ou non. On s'inquiète forcément au début d'une relation,  à savoir si ça durera ou non.

    Ce n'est pas ce dont je veux parler aujourd'hui. Il y a deux personnes que je connais, qui sont en couple depuis quelques mois maintenant, et qui ont également dix ans d'écart. Et je n'en finis pas d'être choquée.

    Je récapitule un peu et j'éclaircis : elle a bientôt 17 ans, lui bientôt 27. Je les ai connus dans une association étudiante. Il y a peu encore, il était marié, il vient de divorcer. C'est un ami de mon amoureux, c'est l'amie d'une de mes amies. Quand j'ai appris qu'ils étaient ensemble, ce n'était pas encore officiel, c'était tout frais, et ils se cachaient, à cause du divorce ou des qu'en-dira-t-on. Je l'aidais, lui, à déménager. J'avais fait de vieilles blagues en mettant les pieds dans le plat, et sans croire le moins du monde à ce que je racontais, des histoires de mec qui faisait la sortie des écoles, il avait pâli et je n'y avais pas prêté attention. Mon amoureux m'a prévenue pour que je sois plus discrète. J'eus mal au ventre pendant trois jours.

    Je somatise. Quand quelque chose me tracasse, je le ressens physiquement. Par exemple, j'ai froid quand je suis intimidée (entretien d'embauche, rendez-vous important avec quelqu'un que je ne connais pas bien, examens). Je tousse avant de m'endormir quand je me sens perdue (c'est très rare). J'ai mal au ventre quand je ressens un danger. C'est souvent embarrassant parce que ma raison me dit qu'il n'y a pas de raison de s'inquiéter, mais c'est parfois un signal d'alerte utile. Mon ventre me dit ce que je ne détecte pas toute seule. Attention, Marquise, c'est ta peau que tu risques cette fois.

    Je reconnus donc l'alerte intime. J'étais écœurée et je n'arrivais pas à trouver ça normal. Il n'était pas normal, selon moi, qu'une fille de 16 ans et un homme de 26 sortent ensemble, et il n'était pas non plus normal que je m'en offusque, d'abord parce que j'avais moi-même dix ans de moins que mon amoureux, ensuite parce que leur histoire ne me concernait pas.

    A force d'introspections je me suis dit que tout ceci était peut-être lié à un autre fait qui me touche intimement. Quand j'étais au lycée, mon beau-père a violé ma petite sœur. Bien sûr, un procès a suivi, un divorce et tout ce qu'on peut imaginer, le bal des avocats, les séances de psy pour essayer de rétablir sans franc succès un équilibre psychique même instable, et par là essayer de retrouver un peu de paix à la maison. J'en parle très rarement parce que j'ai peur que les gens ne se trompent de cible et me plaignent. Je suis heureuse et je n'ai pas besoin de compassion.
    Je crois que j'assimile leur relation à quelque chose de malsain qui aurait un rapport avec ce viol. Et la découverte de cet amalgame intime m'épouvante.

    Parce que moi, je n'ai pas été violée, et bien que toute cette histoire m'ait forcément touchée parce qu'elle a affecté toute la vie à la maison pendant presque cinq ans, je me suis toujours sentie légèrement étrangère à tout cela, ne cherchant jamais à savoir ce qui s'était réellement passé, dans les détails, et la suite juridique. J'ai construit ma vie sur des bases que je trouve saines, entre refus de certains modèles, adoption d'autres et remodelage. Je n'ai pas peur des hommes et de leur puissance sexuelle, et je ne m'offre pas non plus au premier venu. Selon l'avis général j'ai la tête sur les épaules sans être cynique, et je trouve que c'est une bonne réussite.
    Et voilà que ces deux-là réveillent en moi un traumatisme que je n'ai jamais cherché à explorer, ne me sentant en rien malheureuse. J'étais la première à leur dire qu'ils n'avaient pas à se préoccuper de l'avis des autres. Si les autres sont gênés, c'est leur problème. Disais-je en pensant à moi-même.

    Je me suis rendue compte aussi que lorsque ce couple voyait mon amoureux ou mon amie, j'étais jalouse de n'avoir pas été là, alors que je ne suis pas si proche que ça d'eux. Parce que, ai-je diagnostiqué, je voulais être présente pour les surveiller, et m'assurer que tout allait bien et que je m'étais fait des idées. Exquise Marquise, la pourfendeuse des horreurs modernes.

    Lorsque, en le lisant,  j'ai associé le surnom MSN de ce garçon (Le loup est rentré!) à leurs relations intimes, j'ai décidé de prendre rendez-vous avec un psy.

 

27 janvier 2008

La vaisselle

    C'est moi qui fais la vaisselle dans le couple. Ça ne me dérange pas. Et même, depuis quelque temps j'ai remarqué que ça m'apaisait après une dispute, une déception ou un désagrément.

    La vaisselle est un obstacle facile et rassurant. Après un échec dans ma vie, une confrontation angoissante, je m'attelle à cette tâche aisée, et j'ai l'impression que tout devient facile. Il y a des choses que je loupe, mais il y a de la graisse dans le plat, et je sais en venir à bout. Tout se passe entre l'assiette et moi, je n'aime pas être épiée. Parfois je chantonne. Et je frotte consciencieusement, mes peurs s'effacent comme les traces de sauce, et je reprends confiance. Puisque j'arrive à faire la vaisselle, j'arriverai demain à faire quelque chose de plus grand. Tout n'est pas perdu. J'analyse les couverts d'un œil plus critique que si je faisais un commentaire de texte.

    J'en ressors avec un sentiment de satisfaction. C'est une réussite, et en plus de ça j'ai fait quelque chose de bien, j'ai éliminé la saleté comme si c'était un démon pernicieux.
    Parfois j'arrive chez mon amoureux et je vois qu'il n'a pas fait sa vaisselle. Et je retrousse mes manches. Il n'aime pas ça, il a un peu honte, mais je me sens investie d'une mission sacrée. Je rapporterai la lumière et la transparence parmi les verres, je pourfendrai la noirceur qui encombre la grille du four, je serai la rédemptrice de sa cuisine. Je servirai à quelque chose.

10 janvier 2008

Le space cake

    Le moins qu'on puisse dire c'est que je regrette.
Mon amoureux avait récupéré une dose à fumer pour le nouvel an, il lui en restait un peu. Je n'ai jamais fumé, ni cigarette ni autre, et n'ai jamais eu envie de commencer. Par contre j'étais curieuse de connaître les effets du THC, mais je ne voulais pas avoir la gorge explosée ni risquer d'aimer le tabac. Je lui ai demandé de me préparer un space cake. Nous l'avons mangé un soir où nous n'avions rien de prévu, devant le début d'un film.

   C'est arrivé d'un coup. La pièce qui tournait inlassablement, une chape de plomb sur la tête, et froid, comme un vent qui m'aurait effleurée. L'impression étrange que tout ce qui m'entourait était en carton, la table, le lit, l'ordinateur, comme dans ces livres pour enfants où une scène en carton découpé s'ouvre en trois dimensions quand on tourne une page. Mon amoureux souriait de me voir hallucinée.  Tout était bizarre, ça m'a amusée.
    Pas longtemps : peu après sont arrivés les réveils. Une brusque prise de conscience de ce qui m'entourait, un retour de la lucidité, qui, parce qu'il supposait que j'avais perdu conscience de la réalité, était terrifiant. Ça signifiait qu'à tout moment je pouvais replonger. Mais je n'avais pas la sensation de replonger justement, seulement celle de me réveiller, toutes les demi-secondes. Mon crâne était comme couvert de plomb, lourd et lent. Je ne comprenais rien au film alors que je sentais confusément qu'il était bête comme chou (Clerks de Kevin Smith). En fait c'est inexact, je faisais des efforts surhumains pour rester attentive au film et suivre les dialogues. Surtout ne pas se laisser submerger; allez Marquise, ça tourne mais on s'en fout, comprends, comprends, tu en es capable, tout sera revenu demain à la normale, accroche-toi. Je comprenais finalement ce que les personnages à l'écran faisaient et disaient, mais j'oubliais tout très vite et ne me souvenais plus pourquoi il fallait qu'ils fassent ceci ou cela.Epinal2
    Nous avons arrêté et essayé un épisode des Simpson. J'avais l'impression que les couleurs étaient fades, pas naturelles, comme un vieux dessin old school ou une image d'Epinal. Je n'étais plus sûre de rien.Parfois, dans un brusque sursaut de réalité, je me rendais compte que j'avais déjà vu cet épisode, mais j'étais incapable de savoir ce qui allait se passer ensuite et j'avais toujours beaucoup de mal à suivre.
    Je me sentais très mal et décidai d'aller me coucher. Il me fallut beaucoup de courage et d'attention pour aller aux toilettes et me laver les dents. Se souvenir qu'il faut mettre du dentifrice. Cracher. Tirer la chasse. Ne pas se perdre en route. Rester consciente, à tout prix. Essaye. Une fois au lit, mon amoureux, qui ne souriait plus du tout et s'inquiétait pour moi, se mit à me faire la conversation, à me montrer un jeu sur sa Nintendo DS, à solliciter mon attention pour ne pas que je perde pied. Je m'en rendais compte malgré mon état qui empirait et un élan de gratitude me submergea.
    J'avais la gorge sèche, les lèvres qui collaient aux gencives. Il m'aidait à me redresser régulièrement et à boire. J'écartais largement les jambes dans le lit pour être bien stable avant d'essayer d'avaler deux gorgées sans en mettre partout. J'étais épuisée mais j'avais peur de dormir. Même couchée, la chambre tournait sans cesse, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, toujours. Et pour garder l'équilibre je remuais, j'étais agitée de soubresauts.

    Mon amoureux me veilla jusqu'à ce que je m'endorme véritablement, après avoir somnolé par intervalles pendant plusieurs heures. Il avait laissé la lumière allumée pour que j'aie quelques repères et me maintenait solidement d'un bras ferme. J'eus envie de lui dire que ce n'était pas la peine, car je me rendais bien compte qu'il faisait ça pour me rassurer, mais je dois dire que sa présence fut salutaire. Il m'apporta de la nourriture, prévoyant que j'aurais une faim insatiable, mais je m'endormis avant. Les cauchemars que je redoutais ne vinrent pas.
    Au réveil j'étais bien mieux, j'avais recouvré l'usage normal de mes membres et je n'avais plus de pertes de consciences impromptues. Mais j'eus quand même des difficultés à réfléchir, prévoir et comprendre pendant toute la journée. Mon amoureux avait très mal au bras et était fatigué, il s'était occupé de moi alors que lui-même subissait les effets, certes moins violemment, du gâteau. Par bonheur je me souvenais de tout, je n'avais pas de trou de mémoire. Les doses étaient bien trop fortes et expliquaient ma crise d'angoisse.

    Je regrette, déjà pour la soirée horrible que j'ai passée, ensuite parce que j'ai fait l'expérience du badtrip sans avoir l'euphorie que je recherchais au départ.

Publicité
5 novembre 2007

Août ou la paix amère

    Août fut une étape de plus dans ma relation à l'amour et à la sexualité.

    Je pris des résolutions pour me sortir de ma situation de demande d'affection et de frustration perpétuelles.
    Je trouvai un travail saisonnier en usine, pour m'exténuer suffisamment, pour voir d'autres têtes et pour sortir de mes quatre murs. J'essayai aussi de changer de mentalité. Quelle qu'en soit la cause, mon attitude changea effectivement.

    Je rentrais le soir, épuisée moi aussi. Je ne réclamais plus d'oreille attentive ni de relations sexuelles. Et malgré cela j'étais relativement paisible, même si je n'approuvais pas la façon dont s'était opéré le changement. Mon copain finit par se rendre compte un jour que nous n'avions pas fait l'amour depuis une semaine et que je ne demandais pas. Je lui expliquai la raison : j'avais cessé d'espérer.

    Ce n'était pas à vrai dire un reproche, il le prit pour tel, se disant vexé et blessé. Je finis par m'emporter. Mes efforts infructueux à coups de lingerie fine, d'épilations fréquentes et soignées n'avaient pas donné de résultat et m'avaient laissé un sentiment d'abandon total. Etait-ce ma faute si je n'arrivais pas, jamais, à faire le premier pas, à lui faire comprendre mon désir? Et quand il le ressentait, devais-je toujours être déçue de voir qu'il était trop fatigué, qu'il n'avait pas envie de moi, ou qu'il me faisait l'amour pour me calmer? Devais-je toujours me voir comme une nymphomane harassante, mal aimée et incapable de se contrôler, avec toute la honte de soi que ça impliquait?
    Il voulut promettre de me faire l'amour plus souvent. Je n'étais pas satisfaite. J'étais désolée de l'avoir blessé, mais je refusais qu'il le fasse autrement que par désir. La sexualité n'est pas un projet.

    L'usine me fournissait un prétexte pour ne pas lui en vouloir : éreintée, j'avais plus envie de dormir que de faire l'amour et enfin, ça ne venait plus de lui. Je m'endormais en pleurant d'avoir perdu ce qui à mes yeux était le symbole de ma jeunesse. J'attendais la rentrée avec hâte pour quitter son appartement et prendre du recul, pour repartir sur des bases plus saines... ou tout arrêter.

5 octobre 2007

Juillet ou la frustration

    De l'eau a coulé sous les ponts.

    Je suis toujours en couple avec mon amoureux après un été difficile. Je ne sais pas exactement pourquoi, mais nous tenons bon.

    Je ne travaillais pas au mois de juillet, j'avais rendu ma chambre d'étudiante, je m'apprêtais à passer un mois de tendresse entre ses bras. C'était sans compter les habitudes qu'il avait gardées de son célibat. Je n'avais rien à faire de mes journées que de m'ennuyer en surfant sur Internet, lire un peu, jouer à des jeux vidéo. Il rentrait du travail le soir, j'étais impatiente de le retrouver et d'avoir enfin quelqu'un à qui parler. Lui avait plutôt envie de se reposer, de jouer un peu, de voir des amis.

    Vexée de voir mon enthousiasme et mes avances repoussés, je me suis mise à me refermer sur moi-même, à ne plus vouloir lui parler et à ne lui répondre que par des remarques acides qu'il prenait, et c'était le but, mal. Vexé à son tour, il n'avait plus non plus envie ni de me toucher ni de me parler, et je nous voyais nous enfermer dans un cercle que je détestais. Chaque nuit je pleurais de n'être pas capable de surmonter mes déceptions pour nous donner une autre chance et repartir sur des bases plus saines.
    Par téléphone, mes amis me racontaient des blagues coquines et je riais jaune. Je ne me voyais plus désirée, je ne me sentais plus désirable, je le ressentais comme la perte irrémédiable de ma jeunesse.

    J'en vins un soir, alors qu'il dormait à mes côtés, à me demander ce que je faisais et à quoi ça allait me mener. Je me trouvais jeune et belle, pleine de vie et d'envies, bridée de me restreindre à lui. Je le trouvais vieux, satisfait de si peu et indigne de moi. Cette nuit-là, j'aurais voulu sortir et arpenter les trottoirs sans fin pour oublier l'humiliation d'avoir choisi ce joug. Mais je ne connaissais personne d'autre, tous mes amis avaient déserté la ville, et l'idée de faire la tournée des bars ou des discothèques en quête d'un visage aimant me répugnait. Cette nuit-là, je le méprisai.

    Ce sont surtout des raisons pratiques qui m'empêchèrent de le quitter. Il ne me suffisait plus, mais je n'avais que lui.

24 mai 2007

Le dénombrement

what_xkcd_means
   

    Cette image me rappelle une pièce de théâtre de Yasmina Reza, L'Homme du hasard. Une femme y parle de la maladie de son frère, qu'elle appelle maladie du dénombrement, et qui lui fait avoir des pensées et des comportements étranges. Il estime qu'il y a des dalles dans le hall de son immeubles sur lesquelles on peut marcher et d'autres non, et veut faire virer la concierge qui ne respecte pas cette règle tacite. C'est un exemple parmi tant d'autres.

    Si cette maladie existe vraiment (j'ai fait quelques recherches qui n'ont pas abouti), alors je crois que je l'ai. Quand je suis en voiture avec quelqu'un, je compte les arbres au bord de la route, ou j'imagine quelqu'un qui sauterait le long des bandes blanches au bord de la route pour ne poser les pieds que sur le blanc. Je compte les poignées de mes placards, je compte les bougies sur mon bureau et les biscuits dans la boîte à gâteaux. Je compte tout et surtout ce qui ne sert à rien. Comme l'illustre l'image, je fais des calculs bizarres à propos des dalles sur le sol, je calcule les itinéraires pour gagner quelques mètres ou quelques secondes et quand j'égare mon téléphone je de mande à quelqu'un de m'appeler. Je ne fais rien avec la fonction d'Ackermann, vu que malgré tout je ne comprends pas grand-chose aux maths.

    Je n'en parle jamais, il est évident que c'est très étrange et que peu ont cette attitude psychique. On m'a parlé d'un TOC, je n'y crois pas. Tout se passe dans ma tête et cela n'affecte en rien mon comportement.

23 mai 2007

L'amour 2

    J'ai une petite déprime.


    Rien de grave, je suis en bonne santé et mon entourage aussi, je ne stresse absolument pas pour mes examens, je n'ai pas de problèmes d'argent.


    Dire que je ne sais pas ce qui m'arrive serait faux.
    Entre la fin de mes cours et le début de mes examens je suis restée chez mon copain plusieurs jours. Nous sommes très souvent ensemble. Demain j'ai ma première épreuve, et hier il m'a demandé si je dormais chez lui ce soir ou non. J'ai dit que je ne savais pas. Il a ajouté que si je dormais chez moi, ça lui ferait une soirée tout seul, à faire ses comptes, jouer avec des amis sur Internet, etc.


    Ce soir je dors chez moi.
Je sais qu'il ne veut pas me chasser, d'ailleurs il me l'a dit, mais je me sens prise en faute, comme s'il m'avait accusée de l'étouffer. Je sais que c'est ce que ses amis pensent : que depuis que je sors avec, il les voit beaucoup moins. Ils l'ont dit l'air de rien, et j'ai pris ça comme un reproche, à tort ou à raison. C'est un fait, depuis qu'il me consacre du temps, il en passe moins avec eux. Il reprochait à son ex de précipiter les choses, d'être venue s'installer chez lui trop soudainement. Qu'en est-il de moi?


    Je ne me suis pas installée chez lui, mais j'y ai pris des habitudes. J'ai un côté du lit et ma brosse à dents sur son lavabo. Je ne sais pas où est le juste milieu.


    Nous discutons parfois de notre couple, sachant aussi bien l'un que l'autre que le dialogue est essentiel. Pourtant à chaque fois j'en ressors avec le sentiment insupportable d'être stupide. Je lui expose mes soucis, il me dit en voulant me rassurer que ce n'est pas un problème, que je ne dois pas m'inquiéter, parce que ceci et cela. Effectivement, à la fin je me dis que mes angoisses étaient idiotes et je m'en veux de m'inquiéter pour si peu. Si je lui dis, il me répond que non, voyons, je ne suis pas bête du tout, ni immature, il explique. Je veux lui montrer que si, justement, par rapport à lui j'ai l'impression d'être aussi mature qu'une chenille face à un papillon, pour tout un tas de raisons qu'il démonte allègrement en me disant que la maturité et l'intelligence ce n'est pas ça. Je finis par me ranger à son avis en me disant qu'il n'a pas tort et que je suis idiote de penser autrement.


    A bien y réfléchir, il est très gentil, il m'aime et me le montre, mais il est condescendant avec moi sans s'en rendre compte, et déjà que je l'idéalise beaucoup, cela me rabaisse encore plus. Il faudrait que je lui en parle sans le laisser m'interrompre, en espérant qu'il comprenne.

    Je digresse, mais en fait pas tant que ça : tout ça pour vous dire que si je suis chez moi ce soir, à blogger pour me remettre les idées en place, c'est parce que j'ai honteusement fui. J'ai prétexté mon épreuve de demain, le fait qu'il faille me lever tôt, mais ces motifs sont fallacieux. Je ne dors pas chez lui parce que je me sens honteuse de l'accaparer. Et que lui le soupçonne, je ne sais pas jusqu'à quel point. Je lui ai dit que j'allais rentrer chez moi, et que ça lui donnerait l'occasion et le temps de jouer avec ses amis. Une fois de plus il m'a arrêtée.
"-Hé, ma puce, tu ne pars pas POUR me donner le temps de faire ça, d'accord? Tu pars si tu veux et tu es toujours la bienvenue. Je ne te chasse pas.
-De toute façon je commence à huit heures, il faut que j'y sois en avance, il y a 30min de bus et je dois passer prendre mes affaires. C'est plus simple que je dorme chez moi."

    Je ne pense pas qu'il m'ait crue.
    Est-ce parce qu'il est de dix ans plus vieux que moi? Il est courant de dire que les amours juvéniles sont plus passionnées et plus exclusives que les amours tardives. Mon premier amoureux avait les mêmes amis que moi, quant au deuxième il habitait loin de moi et lorsque nous pouvions passer un peu de temps ensemble ses amis, qu'il pouvait voir le reste du temps, nous laissaient tranquilles. Mon chéri habite dans la même ville que moi, je n'y ai pas beaucoup d'amis et ils sont en vacances. Est-ce parce que je suis plus jeune que je veux passer tant de temps avec lui? Est-ce parce qu'il est plus vieux qu'il se contenterait de moins?

    En bref, je suis morose, et je crois que ça va passer. Mais il faudra bien que j'affronte un jour les questions qui me viennent.

2 mai 2007

Un dernier pour la route 2

    Le week-end s'est très bien passé contre toute attente. Je suis arrivée Vendredi soir chez mon ex qui est parti tout de suite faire du roller avec des amis, j'ai passé la soirée avec sa soeur et ses parents qui ont été charmants. J'ai essayé la robe, nous avons ajusté et cousu l'ourlet. Elle est magnifique. J'ai dormi dans le lit de sa soeur, elle a dormi dans son lit à lui et il a dormi sur le canapé (je ne voulais pas, ils ont insisté).

 

    Samedi matin, debout à six heures, nous nous sommes préparés pour aller rejoindre le reste de l'association. Nous avons pris un mini-bus qui nous emmenait à la convention (pour ceux qui ne savent pas ce qu'est une convention, c'est un regroupement de passionnés autour d'un thème, souvent les mangas, l'univers de certains films, etc., où l'on trouve des gens costumés en leur personnage préféré. On peut assimiler ça à un salon, au sens de salon de l'agriculture, mais la différence est que l'on essaie autant que possible de gommer l'aspect commercial).
L'ambiance était bonne malgré quelques remarques du style "Vous comprenez, je suis en manque moi..." que j'ai ignorées.

 

    A la convention, chacun de nous évitait l'autre autant que possible, ou prenait un ton des plus neutres lorsque c'était absolument nécessaire. Je ne me suis donc pas préoccupée de lui, ou très peu et ai pu profiter de la convention et de l'amitié de l'association. J'ai revêtu ma robe pour mon cosplay (par souci d'anonymat, je ne vous dirai ni de quelle convention je parle, ni de quel costume, ne m'en veuillez pas) qui a fait l'unanimité, j'ai même remporté un prix (plutôt symbolique, car le lot m'indiffère) dont je suis très fière.


    J'ai partagé ma chambre d'hôtel avec la soeur de mon ex, il n'y a eu aucun problème. Nous sommes allés faire une promenade le soir dans les rues de la ville, et ce fut l'occasion d'avoir une charmante discussion avec un autre costumé de l'association que je n'avais encore que vaguement côtoyé.
Comme à mon habitude (très embarrassante), à force de discuter avec un homme intéressant et drôle, j'avais envie de lui sauter au cou (rien de plus).


    Je suis repartie le dimanche en fin d'après-midi, sans attendre les autres (mon trajet était bien plus long que le leur). J'ai dit au revoir à tout le monde, bien décidée à les revoir sans trop tarder, contrairement à ce que mes appréhensions m'avaient fait penser. Mon ex m'a demandé de passer son bonjour à mes amis. "Et dis-leur que ça va... Je ne vais pas me suicider." Il est évident que le message n'est destiné à nul autre que moi, mais je vais le transmettre tout de même. Cela ne me blesse pas, cela m'exaspère, non pas par orgueil ou amour-propre, mais parce que je vois bien qu'il manque toujours autant de finesse.


    J'ai trouvé quelqu'un pour m'emmener à la gare. Le quelqu'un en question, je l'avais encontré il y a un peu plus d'un an, pour ma première convention. J'avais eu avec lui une de ces conversations passionnantes qui me font m'enflammer et dont je ressors un peu étourdie, enivrée par mes mots et l'attention de mon interlocuteur. Apparemment lui aussi s'était enivré, mais plutôt du feu qui m'animait et qui devait illuminer mon regard. Il m'avait fait une déclaration très touchante et tendre, que j'avais tenté de repousser aussi gentiment que possible. Je l'avais revu une fois depuis, en coup de vent, juste le temps de lui faire un sourire pour lui montrer que je ne lui en voulais absolument pas.


    Ce monsieur en question s'est donc proposé pour m'emmener. Nous nous sommes assurés mutuellement que c'était un réel plaisir de se revoir, il m'a dit qu'il avait toujours le béguin pour moi, depuis l'année dernière.
"-Mais tu sais je ne suis pas célibataire.
-Non non mais je dis ça comme ça, c'est tout... Mais tu ne m'avais pas dit hier que...?
-Moi aussi, je dis ça comme ça, c'est tout. J'ai dit hier que je n'étais plus avec ***.
-Ah oui, effectivement, ça ne veut pas forcément dire que tu es célibataire..."
Je lui ai donné mon adresse internet et suis montée dans le train. J'étais heureuse d'avoir retrouvé cette chaleur et cette douceur dans son regard, avec quelque chose d'immuable aussi. Il serait toujours un énorme nounours, le genre qui me donne envie de les prendre dans mes bras, alors que je sais très bien qu'il ne faut pas, parce que ce geste de simple affection pour moi n'a pas la même signification pour tout le monde.


    Je suis rentrée chez moi, mon amoureux est venu me chercher, et c'est en le sentant me serrer contre lui que j'ai senti à quel point il m'avait manqué.
Ces éclats d'amitié fulgurante qui me frappent, par exemple lorque mon ami m'avait amenée à la gare, sont des chimères fabuleuses qui m'envoûtent plus que mon amoureux lui-même n'en serait capable, mais je devine qu'elles se fanent à la lumière du quotidien, et je veux les préserver en ne les vivant pas, quitte à regretter de seulement les imaginer.

Publicité
1 2 3 > >>
En mon fort intérieur
Publicité
Archives
Publicité